SOUFFRANCES AU TRAVAIL |
La Lettre de SAT N° 3 Janvier—Février 2008 |
« Souffrances au travail » et droit du sujet au transfert Marie-Hélène Doguet-Dziomba Texte présenté aux journées PIPOL des 30 juin 2007.
Texte présenté aux journées PIPOL 3 La psychanalyse en prise directe avec le social 30 & 31 juin 2007
Texte |
Pour cerner la « prise directe avec le social » des psychanalystes qui animent l’association « Souffrances au travail », je suivrais trois pistes. Tout d’abord un constat : l’émergence de souffrances au travail à l’échelle de masse est un fait nouveau. C’est aussi un fait nouveau que des sujets en proie à une forme particulière de malaise dans leur travail puissent venir rencontrer un analyste d’orientation lacanienne. Qu’avons-nous constaté ? |
Nous voyons arriver des sujets chez qui a été touché, par des pratiques confinant souvent à l’abjection, un point central de ce qui faisait l’assise même de leur subjectivité. Nous voyons arriver des sujets pétrifiés dans une douleur d’exister, arrêtés dans leur élan vital, figés par l’angoisse et la honte. Je considère que nous recueillons des échos subjectifs des effets de la décomposition accélérée du discours du capitaliste – dont Lacan diagnostiquait la « crise ouverte » dans les années 70. Il s’agit du passage à l’encan du sujet lui-même comme nouvelle forme de « plus-value » – ce que promeut le maître sous le doux nom de « séparabilité ». Ce dont nous recueillons les échos subjectifs n’est autre que le déchaînement de la pulsion de mort dans le champ économique. Notre pari analytique est de permettre à un sujet, à partir de la rencontre singulière avec un analyste, d’arracher à la douleur qui l’accable quelques paroles qui vaillent pour ce sujet, qui viennent revivifier son désir, qui lui permettent à la fois de se rebrancher sur son Autre et de se séparer suffisamment d’une jouissance obscène et féroce. C’est un pari au cas par cas. De là peut se dessiner une « prise directe avec le social ». Il s’agit pour les psychanalystes de donner corps « dans le social » à un droit imprescriptible du sujet au transfert, de le faire exister, de le mettre inlassablement en acte. Tel est le sens profond de la création de l’association « Souffrances au travail ». De là se déduit une « déprise ». Nous ne sommes pas là pour « améliorer les conditions de travail » ni pour perfectionner les nouveaux visages de la « plus-value ». Nous n’avons ni à « collaborer » ni à transiger sur ces questions, dés lors que ce qui fonde concrètement notre action « dans le social » n’est rien d’autre que l’appel le plus brûlant du transfert là où se déploient chez un sujet les ravages d’une jouissance à lui-même inconnue. Par contre nous avons à faire savoir, à transmettre la clinique qui se dépose, se série au fil de nos conversations. Tel est le sens de nos réunions de « supervision », tel est aussi le sens de colloques dont le premier a déjà eu lieu. Cette conversation avec des « professionnels » d’autres orientations que la nôtre, avec des syndicalistes, des politiques etc., est aussi notre « prise directe avec le social ». |